La mutation du modèle fiscal émirati
Pendant des décennies, les Émirats arabes unis ont bâti leur attractivité sur une fiscalité quasi nulle. Les investisseurs internationaux y voyaient une plateforme idéale pour créer des holdings, gérer des flux financiers et développer des structures internationales. Mais depuis juin 2023, un tournant majeur est intervenu : l’instauration d’un impôt sur les sociétés (Corporate Tax, CT) au taux de 9 %.
Ce taux reste très compétitif au regard des standards internationaux, mais il modifie les équilibres. Désormais, la fiscalité émiratie distingue clairement entre revenus exonérés et revenus imposés, entre sociétés de zone franche (Free Zones) et entités établies en Mainland.
Pour les holdings, souvent utilisées comme “cœurs financiers” de groupes internationaux, ce changement impose de revoir les structures et de s’assurer que l’on bénéficie bien des exonérations prévues par la loi.
1. Qu’est-ce qu’une holding aux Émirats ?
Une société holding est une entité dont la mission principale n’est pas d’exercer une activité commerciale, mais de détenir et gérer des participations. Aux Émirats, une holding peut générer des revenus via :
- Les dividendes reçus de ses filiales.
- Les plus-values lors de la cession de titres.
- Les intérêts issus de prêts intragroupe.
- Les redevances (royalties) et revenus de propriété intellectuelle
.
En pratique, une holding émiratie peut être installée :
- En Mainland (le territoire classique des Émirats).
- En Free Zone, avec la possibilité, sous conditions, de bénéficier d’un régime fiscal à 0 %.
Ces holdings sont au cœur des stratégies de planification internationale, car elles permettent de centraliser les flux financiers d’un groupe et de profiter des conventions fiscales bilatérales signées par les Émirats (plus de 140 accords).
2. Les revenus exonérés : dividendes et plus-values
2.1. La règle de la “participation exemption”
Les dividendes étrangers et les plus-values de cession de titres peuvent être exonérés, mais uniquement si trois conditions sont remplies :
- Participation minimale de 5 % dans la filiale.
- Durée de détention d’au moins 12 mois.
- La filiale doit être soumise à un impôt d’au moins 9 % dans son pays d’implantation
Corporate-Tax-UAE-Holding-Compa…
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Cette règle vise à éviter que des filiales situées dans des paradis fiscaux n’alimentent des holdings émiraties exonérées d’impôt.
2.2. Exemple chiffré
Imaginons une holding émiratie qui détient 10 % d’une filiale allemande depuis 3 ans. Cette filiale verse un dividende de 1 000 000 €.
- En Allemagne, le taux normal d’impôt sur les sociétés est de 15 %.
- Les conditions de participation exemption sont donc respectées.
- Résultat : le dividende est exonéré d’impôt aux Émirats.
Si en revanche la même holding détenait une participation dans une société située aux îles Caïmans, aucun impôt ne serait prélevé localement. Dans ce cas, le dividende pourrait être imposé aux Émirats au taux de 9 %.
3. Les revenus imposables : intérêts et royalties
3.1. Intérêts
Les revenus d’intérêts (par exemple, sur des prêts intragroupe) sont soumis au taux standard de 9 %. Toutefois, la déductibilité des intérêts pour l’emprunteur est plafonnée par la règle des 30 % de l’EBITDA.
Exemple :
- Une filiale française emprunte 10 M€ à une holding émiratie avec un taux d’intérêt de 5 %.
- Les intérêts annuels sont donc de 500 000 €.
- La filiale française peut déduire ces intérêts dans la limite de 30 % de son EBITDA. Si son EBITDA est de 1,2 M€, seuls 360 000 € sont déductibles.
Côté Émirats, la holding est imposée sur les 500 000 € d’intérêts perçus (au-delà de 375 000 AED d’exonération).
3.2. Redevances et propriété intellectuelle
Les royalties et autres revenus liés à la propriété intellectuelle (marques, licences, logiciels, brevets) sont imposés au taux de 9 %.
De plus, ces revenus doivent être facturés à des conditions de marché (arm’s length principle). Une holding émiratie qui facture des royalties artificiellement bas à une filiale européenne pourrait voir ses revenus réajustés en cas de contrôle.
4. Les financements intragroupe : opportunités et limites
De nombreuses holdings jouent le rôle de “banque interne”, en finançant les filiales du groupe.
Le régime fiscal émirati autorise ce schéma, mais impose des garde-fous :
- Respect de la substance économique : la holding doit disposer de moyens réels pour prêter (fonds propres, équipes de gestion).
- Limite de déduction des intérêts chez l’emprunteur : règle des 30 % EBITDA.
- Prix de transfert : les taux appliqués doivent correspondre aux taux de marché.
Cette approche s’inscrit dans la logique internationale de lutte contre l’érosion de la base fiscale (BEPS).
5. L’avantage compétitif : absence de retenue à la source
L’un des atouts majeurs des Émirats reste l’absence de withholding tax (retenue à la source) sur les dividendes, intérêts et redevances sortants.
Cela signifie qu’un holding basé à Dubaï peut redistribuer ses revenus vers un actionnaire en Europe ou en Asie sans subir de ponction locale.
Toutefois, le pays de la filiale peut, lui, appliquer une retenue à la source. Par exemple :
- Une filiale française qui verse un dividende à Dubaï est soumise par défaut à une retenue de 25 %.
- Mais grâce à la convention fiscale France–Émirats, cette retenue peut être réduite à 0 % si les conditions sont respectées.
6. Le régime des zones franches (Free Zones)
Certaines holdings implantées en zone franche peuvent bénéficier d’un taux de 0 % sur leurs revenus. Mais les conditions sont strictes :
- Être reconnue comme Qualifying Free Zone Person.
- Ne percevoir que des revenus qualifiants (dividendes et plus-values de filiales étrangères ou Free Zone).
- Limiter les transactions avec le Mainland émirati.
Un non-respect des conditions entraîne une imposition au taux normal de 9 %.
7. Les obligations de conformité
Le nouveau régime fiscal impose aux holdings :
- Enregistrement fiscal obligatoire.
- Dépôt d’une déclaration annuelle.
- Documentation des prix de transfert pour toutes transactions intragroupe.
- Respect des Economic Substance Regulations (ESR), qui imposent une activité réelle aux Émirats.
Une holding “boîte aux lettres” est désormais insuffisante. Les autorités fiscales peuvent requalifier et sanctionner en cas d’absence de substance.
8. Cas pratiques comparés
Cas 1 : Holding en Mainland
Une holding basée à Abu Dhabi perçoit 2 M€ de dividendes d’une filiale en Allemagne et 500 000 € d’intérêts d’une filiale française.
- Dividendes : exonérés.
- Intérêts : imposés à 9 % (soit 45 000 €).
→ Résultat : fiscalité faible mais réelle.
Cas 2 : Holding en Free Zone qualifiante
Une holding implantée dans la JAFZA (Jebel Ali Free Zone) perçoit 3 M€ de dividendes de filiales en Europe.
- Dividendes : exonérés.
- Taux de CT : 0 %.
→ Résultat : aucun impôt local, optimisation maximale.
Cas 3 : Holding sans substance réelle
Une holding à Dubaï ne dispose pas de bureaux ni d’employés et sert uniquement à encaisser des royalties.
→ Risque : requalification par les autorités fiscales comme société écran → taxation effective + sanctions.
Un eldorado sous conditions
Les Émirats arabes unis demeurent une destination de choix pour structurer une holding et bâtir des stratégies financières internationales. L’absence de retenues à la source, la participation exemption et les régimes préférentiels offerts par les Free Zones constituent des leviers puissants d’optimisation.
Cependant, l’époque du “tout est possible sans cadre” est révolue. Désormais, la clé du succès réside dans la capacité à mettre en place une structuration conforme, documentée, et surtout adossée à une véritable substance économique. C’est la condition indispensable pour sécuriser ses revenus, éviter les requalifications et profiter pleinement des avantages du système fiscal émirati.
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